- Essai Volkswagen Golf 8 « R » : la plus radicale ! - 18 avril 2023
- Essai Cupra Formentor VZ5 : sur les traces d’Audi - 10 février 2023
- Essai Alpine A110 GT : Taillé pour le circuit en tout confort ! - 10 janvier 2023
Depuis des dizaines d’années, les ingénieurs motoristes sont à la recherche de la combustion parfaite au sein des moteurs à combustion interne tel que les essence, diesel ou gaz. En effet, chaque année des évolutions sont trouvées, testées et approuvées ou non afin d’augmenter le couple, la puissance et de diminuer les polluants et la consommation de carburant. Autrement dit : « faire plus avec moins » !
Mazda a toujours été un peu à part dans ce domaine pour plusieurs raisons :
- Il est le seul à avoir gardé le moteur rotatif Wankel dans ses RX7 et RX8 jusqu’au début des années 2000 justifiant cela par sa simplicité et son gain de puissance. Actuellement, ce moteur est encore à l’étude pour des véhicules hybrides.
- Les ingénieurs Mazda ne sont pas non plus des grands fans des voitures électriques jugeant qu’elles ne sont pas la solution pour diminuer la pollution et le réchauffement climatique. Cela à cause de leur production peu exemplaire sur le plan éthique et climatique mais aussi à cause du mode de production d’électricité dans bon nombre de pays où seront vendues ces voitures qui est encore loin d’être vert (exemple : centrale au charbon).
- Et enfin, Mazda n’est pas non plus un fervent adepte du downsizing des moteurs. Ainsi lorsque quasiment tous les autres constructeurs se sont lancés dans cette « mode », eux, sont restés avec des moteurs plus « gros » ou plutôt de « juste taille pour leurs véhicules » mais en améliorant sans cesse la combustion et les techniques. Beaucoup de constructeurs reviennent d’ailleurs sur des moteurs légèrement plus importants vu que les plus petits moteurs non pas toujours su remplir les objectifs.
Autrement dit, Mazda est à part dans ce domaine ! C’est pourquoi nous avons jugé important de parler de leur toute dernière invention en terme de motorisation : le Skyactiv X : le moteur essence qui allie les avantages du diesel et de l’essence.




Pour pouvoir mieux expliquer le fonctionnement de cet étonnant moteur (au fonctionnement recherché depuis longtemps par bon nombre d’ingénieurs), nous allons d’abord commencer par un petit rappel sur la combustion des moteurs essence et diesel.
La combustion en moteur essence
Le moteur essence fonctionne avec un taux de compression dans les cylindres aux alentours de 9 – 11, une bougie d’allumage par cylindre, pas de bougie de préchauffage et un mélange d’air/essence stœchiométrique le plus souvent c’est-à-dire 14,7gr d’air pour 1gr d’essence (lambda = 1). Ce mélange peut varier jusqu’à 12 : 1 en cas de fortes accélérations pour avoir la puissance maximale mais cela émet beaucoup plus de polluants (HC = imbrulés, CO = monoxyde de carbone et NOx = oxyde d’azote), voilà pourquoi sur des véhicules de tourisme cela est très peu employé, voir plus du tout actuellement. Au niveau de la combustion à proprement dit, nous disposons actuellement le plus souvent de moteurs à injection directe turbocompressés (même s’il existe encore sur le marché des moteurs à injection indirecte atmosphérique) pour gagner en puissance, en couple et en consommation mais au détriment des polluants (particules d’où la pose d’un filtre à particules à l’échappement).
Ces moteurs fonctionnent la plupart du temps avec un mélange air/essence homogène vu que le carburant est injecté (sous haute pression 150 – 300 bars) pendant l’admission, se mélange et puis est allumé grâce à la bougie en fin de compression.
Néanmoins, ils fonctionnent aussi en mode stratifié, c’est-à-dire avec une très faible quantité de carburant injecté durant l’admission et ensuite une 2e faible quantité injectée en fin de compression, juste sous le nez de la bougie. Ainsi, nous avons un mélange homogène mais hétérogène près de la bougie. Cela dans le but de diminuer la consommation tout en ayant une puissance correcte mais malheureusement c’est ce qui produit le plus de particules fines et d’imbrulés. De plus les NOx augmentent aussi dû aux températures de combustion plus élevées et au mélange légèrement pauvre.
PS : en moteur essence, il est impossible d’arriver à un rendement aussi élevé qu’un diesel à cause du phénomène de cliquetis (auto – allumage du mélange). Il est dû à un taux de compression trop élevé, à une pression de suralimentation trop élevée et à une combustion par propagation de flamme (vitesse de combustion lente).
Avantages moteurs essence :
- Moins de polluants (principalement NOx)
- Un peu plus puissant à hauts régimes
- Chaud plus rapidement
- Pour les injections indirectes atmosphériques uniquement : moins de particules fines
Petite vidéo explicative du fonctionnement d’un moteur essence injection directe : https://www.youtube.com/watch?v=4CqB6SK4TQM
La combustion en moteur diesel
Le moteur diesel fonctionne d’une toute autre manière que l’essence. En effet, son taux de compression est compris entre 16 et 20 pour des moteurs classiques, il possède une bougie de préchauffage par cylindre mais pas de bougie d’allumage. De plus il n’existe actuellement plus que des injections directes haute pression (cela donne un meilleur rendement, une diminution des polluants et de la consommation par rapport à une injection indirecte). D’autre part, ce moteur ne subit pas de problème de cliquetis mais nécessite une conception un peu plus robuste vu les pressions plus importantes. Son principal avantage est son rendement plus important synonyme de consommation plus faible. Cela est dû à son mélange air-carburant pauvre : +- 30 -40 gr d’air pour 1gr de diesel injecté (lambda = 2 – 3). Il possède aussi plus de couple ce qui lui procure une certaine force de travail. Son principal défaut est l’émission de NOx dû au mélange pauvre, pour lequel, les véhicules possèdent actuellement des filtres à Ad-Blue (SCR) et de particules dues au mélange hétérogène (mais cela équivaut à l’essence injection directe).

Au niveau de la combustion nous sommes en présence d’un mélange hétérogène, l’injection de carburant se faisant toujours en fin de compression sous haute pression (jusqu’à +- 2000 bars). La combustion est déclenchée, ici, par l’élévation de température et pression au sein du cylindre lors de la phase de compression. Elle se déclenche donc seule et tout le mélange brule d’une traite, pas de propagation de flamme ici (vitesse de combustion élevée). Cela est synonyme de force accrue sur le piston plus longtemps durant sa descente.
Avantages moteur diesel :
- Plus de couple
- Meilleure souplesse
- Meilleures reprises à bas régime
- Consommation moindre de carburant (meilleur rendement)

Le moteur Skyactiv X fonctionnant sous le modèle : SPCCI
Le moteur Skyactiv X est donc un moteur 2.0l essence injection directe combinant les principes des deux moteurs essence et diesel. En effet, le but final est d’avoir le couple et la consommation d’un diesel mais la puissance (accrue) et les NOx (en moindre quantité) d’un essence.

Ce moteur est tout d’abord basé sur l’idée de la combustion HCCI (homogeneous charge compression ignition). En effet, l’idée de ce système était de travailler avec un mélange pauvre et une combustion uniquement par compression (sans bougie). Malheureusement cela n’a jamais fonctionné sur une plage de régime suffisante étant donné le faible contrôle sur la combustion. Mazda est donc partit de cette idée pour l’améliorer et créer un moteur avec un taux de compression de 16,3 : 1 fonctionnant presque tout le temps en mélange pauvre (lambda = 2 – 3). Il faut néanmoins distinguer 2 zones de fonctionnement :
- Petites – moyennes charges et faibles – moyens régime -> SPCCI (spark controlled compression ignition = combustion par compression commandée par bougie -> vitesse de combustion rapide)
- Démarrages à froid, hautes charges et hauts régimes -> combustion essence normale (vitesse de combustion plus lente), allumage entièrement par bougie et rapport stœchiométrique pour le mélange (lambda = 1).

PS : le passage du SPCCI à un allumage classique et inversement se fait très facilement grâce au contrôle de l’entrée d’air via le papillon et au contrôle de la bougie.
Au niveau de la combustion à proprement dit, le compresseur (de type Roots) insuffle de l’air en permanence pour gaver les cylindres et le carburant est injecté, vaporisé, grâce à de multiples mini-trous sous haute pression (+- 350 bars) durant la phase d’admission pour une meilleure homogénéité du mélange. Une fois que le piston arrive en fin de compression, une très faible quantité de carburant est injectée juste sous le nez de la bougie pour donner une zone légèrement riche. C’est ici que cela diffère d’un mode stratifié classique ! En effet, l’étincelle de la bougie est beaucoup plus faible qu’en moteur conventionnel et permet juste d’allumer la zone riche près du nez. A ce moment-là, celle-ci cause une élévation de pression et de température dans toute la chambre de combustion. Le mélange homogène brûle alors d’un coup, comme en moteur diesel (alors qu’en moteur essence conventionnel il y a propagation de flamme) dû au taux de compression élevé.


Il est à noter que le mélange est tellement pauvre que l’étincelle d’un moteur essence normal à elle seule ne saurait allumer ce mélange. Il faut obligatoirement passer par un contrôle SPCCI. C’est de cette manière qu’il est possible d’obtenir une force plus importante sur le piston avec une moindre consommation. De plus, le mélange ne sachant bruler avec un allumage conventionnel, il ne risque pas non plus de s’auto-enflammer (cliquetis) durant la compression dû à sa pauvreté. Il est donc obligatoire d’avoir la zone riche et l’étincelle pour allumer le mélange. Voilà le risque de cliquetis fortement limité par rapport à un moteur traditionnel.
La vidéo ci-joint illustrera bien le principe de fonctionnement des moteurs essence, diesel et Skyactiv X : https://www.youtube.com/watch?v=aAjohUQwSXo


Il faut aussi remarquer que les températures de combustion diminuent avec un mélange pauvre en carburant à cause du surplus d’air présent, ce qui diminue la production de NOx du moteur. Le catalyseur 3 voies et l’EGR suffisent donc à assurer une bonne dépollution.

Les imbrûlés et le taux de CO augmentent par contre lors d’une combustion pauvre mais le catalyseur 3 voies est très efficace pour traiter cela (beaucoup plus que pour les NOx). Voilà pourquoi Mazda préfère travailler de cette manière. Diminuer les NOx produits par le moteur au détriment du CO et des imbrulés (HC).

Un dernier avantage de la combustion à plus basse température est de produire moins d’énergie perdue dans le liquide de refroidissement. Ce système peut donc être légèrement retravaillé par rapport à un moteur conventionnel. En travaillant correctement, comme Mazda l’a fait, sur la gestion de la température moteur, il est toutefois possible d’avoir un moteur très vite chaud comme c’est le cas sur les essences classiques.
Enfin, pour terminer la partie technique, il faut noter que ce moteur possède une petite particularité : sa tête de piston. En effet, celle – ci est dotée d’une tête très spéciale privilégiant un mouvement tourbillonnaire de Swirl intense pour une meilleure homogénéité du mélange. De plus, chaque cylindre est équipé d’un capteur de pression et de température permettant de vérifier si les commandes envoyées par le boiter de gestion moteur correspondent bien à ce qui se passe réellement dans la chambre de combustion. Cela permet d’adapter en permanence si jamais ce n’est pas pile poil juste.
Maintenant, si nous parlions un peu performances ? Ce Skyactiv X développe en effet 180 ch à 6000 tr/min, 224 Nm de couple à 3000 tr/min (10- 30% de plus qu’un moteur essence semblable), respecte la norme euro 6d temp, émet 133 gr de CO2 par km et consomme, sur le papier 5,9l/100 kms en cycle combiné (20% de moins que le Skyactiv G, moteur essence normal). Le papillon des gaz restant aussi quasiment tout le temps ouvert, il diminue le temps de réponse à l’accélération. A priori les chiffres de consommation et de CO2 sont plutôt très encourageants pour un moteur essence. Seul le couple semble faible comparé à un diesel de même puissance. Pour les impressions et chiffres de consommations, nous vous renvoyons vers notre article sur l’essai de la CX-30 équipée de ce moteur. Vous pourrez ainsi vous faire une idée de ce moteur dans un véhicule traditionnel (https://auto4x4enroueslibres.com/2020/07/03/essai-mazda-cx-30-2-0l-skyactiv-x-6mt-et-6at/).


Dernière actualité en date de ce Skyactiv X : L’ « Autobest Jury » s’est rassemblé le 13 février dernier pour délibérer sur la meilleure invention technologique automobile de l’année 2019. Bien sûr, comme vous l’aurez devinez, c’est bien le moteur Mazda Skyactiv X qui a remporté le « Technobest Award » tenu compte de son mode de combustion particulier et surtout très technologique. Il récompense les efforts réalisés par Mazda dans la recherche de la combustion optimale en moteur à combustion interne. Rappelons tout de même que l’union des journalistes belges de l’automobile et de la mobilité (UJBAM) avait déjà décerné en 2018 le prix de l’innovation “FuturAuto” ici en belgique. Chapeau Mazda !

Conclusion : Nous pouvons voir grâce à cette étude l’étendue des recherches qu’a fait Mazda pour arriver à un moteur avec une technologie nouvelle et qui pourrait révolutionner les moteurs essence dans les années à venir. En effet, les moteurs essence étaient toujours porteurs du préjugé qu’une grosse cylindrée consommait beaucoup. Avec cette technologie ce n’est plus le cas, voilà qui pourrait encore donner de belles années au moteur à combustion interne. Beaucoup de consommateurs jugent d’ailleurs les hybrides ou électriques encore trop peu matures et trop chers et préfèrent se tourner vers ce genre de motorisation permettant de répondre à leurs besoins.
Sources : Mazda Belux, Lehrmittel, https://www.guillaumedarding.fr, Fiche-Auto.fr, DS Automobiles