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Bien que la technologie de la pile à combustible soit encore peu présente à l’heure actuelle dans le domaine automobile, elle est en plein développement et porte certains espoirs pour contrer le réchauffement climatique dans un futur plus ou moins proche. En effet, peu de constructeurs ont déjà développé une voiture utilisant ce « mode de propulsion » (la pile à combustible n’est pas un mode de propulsion en soit mais bien une méthode de transformation d’énergie, aspect détaillé plus bas). Néanmoins, il est à noter qu’ils sont nombreux à s’y intéresser depuis plusieurs années et que beaucoup de recherches et développement sont entrepris par différents constructeurs. Parmi ceux – ci, il y a Toyota, avec sa Mirai, sortie en 2015, dont nous avons eu l’occasion de réaliser un essai du modèle de 1e génération (https://auto4x4enroueslibres.com/2021/03/08/essai-de-la-toyota-mirai-de-1ere-generation-lhydrogene-lavenir-de-notre-mobilite/). L’essai du modèle de 2e génération aura lieu dans les semaines à venir de manière à pouvoir les comparer. De façon à apporter plus de précisions sur cette nouvelle technologie prometteuse nous vous proposons donc, ici, un article plus technique expliquant l’hydrogène et ses défis, le principe de fonctionnement et les différents modèles de pile à combustible existants ainsi que leurs domaines d’application. De cette manière le fonctionnement de ces Toyota Mirai, Hyundai Nexo et autres futures voitures à hydrogène ne sera plus un secret pour vous !

Tout d’abord, une pile à combustible a pour but de convertir de l’énergie chimique de combustion au moyen d’une réaction d’oxydoréduction pour créer de l’énergie électrique, de la chaleur et de l’eau. Cette énergie électrique peut alors être utilisée par le ou les moteurs électriques du véhicule et le mettre en mouvement. Elle est constituée principalement de :
- 1 électrode de type anode pour émettre les électrons (réaction d’oxydation)
- 1 électrode de type cathode pour collecter les électrons (réaction de réduction)
- 1 électrolyte séparant les 2 électrodes
- 1 catalyseur pour accélérer la vitesse des réactions. Il est actuellement muni de platine, un métal rare et couteux à exploiter d’où les diverses études qui sont entreprises pour le remplacer par autre chose de plus économique et écologique tel que les nanotechnologies. Ci-joint, un article pour illustrer le problème rencontré avec les catalyseurs sans platine. (https://inc.cnrs.fr/fr/cnrsinfo/piles-combustible-mieux-comprendre-linstabilite-des-catalyseurs-sans-platine)
Dans le cadre de cet article, nous allons principalement aborder les piles à combustible dihydrogène – dioxygène car ce sont celles-là qui sont utilisées dans le domaine automobile.
Sources et défis liés à l’hydrogène :
Bien que l’hydrogène soit abondant sur Terre, dans les étoiles et sur les planètes gazeuses, il est toujours lié à une autre molécule « parasite ». Ainsi on retrouve l’hydrogène H avec :
- Du carbone pour former du méthane : CH4
- De l’oxygène pour former de l’eau : H2O
- Du soufre pour former du sulfure d’hydrogène : H2S
De cette manière, il est toujours nécessaire de séparer l’hydrogène via diverses méthodes :
- Reformage à la vapeur d’eau surchauffée entre 700 et 1100°C du gaz naturel ou du biogaz. En présence de vapeur d’eau et de chaleur, les molécules de carbone du méthane CH4 se dissocient. Après 2 réactions successives, on retrouve du dihydrogène (H2) et du dioxyde de carbone CO2. Cette action émet donc du CO2 et consomme du gaz naturel. Remarque, ce procédé fonctionne également avec du pétrole.
- Électrolyse de l’eau. Grâce à un courant électrique, on arrive à séparer la molécule d’eau H2O en molécules de dihydrogène H2 et de dioxygène O2. Malheureusement la consommation d’électricité est grande et le coût de cette technique reste très élevé (de l’ordre de 4x plus que le reformage à la vapeur) si bien qu’elle n’est pas beaucoup utilisée mais est en voie de développement. Notamment des études sont réalisées pour arriver à une électrolyse à haute température entre 700 et 1000°C et ainsi réduire les coûts et les besoins en électricité en utilisant des miroirs permettant aux rayons du soleil d’amener cette température localement. De plus cette méthode convient bien pour utiliser les pics d’électricité produite par les énergies renouvelables tel que l’éolien ou le solaire.

- Gazéification du charbon de bois ou de la biomasse. Il faut bruler ce charbon dans un réacteur entre 1200 et 1500°C pour que les gaz émit forment du dihydrogène (H2) et du monoxyde de carbone CO.

- A partir de l’énergie solaire sur des algues microscopiques (vertes unicellulaires) et/ou des bactéries (cyanobactéries) par la méthode de la photosynthèse. Cette méthode est encore en cours de recherche et développement en laboratoire pour l’instant. Cependant il a été observé que ces algues et ces bactéries produisaient de l’hydrogène en présence d’énergie solaire (rayons) et d’eau. Le tout est donc d’arriver à comprendre ce processus naturel pour ensuite le copier à grande échelle. Affaire à suivre donc.


D’autre part, une fois produit, il est nécessaire d’être en mesure de stocker cet hydrogène. L’hydrogène est le gaz le plus léger de tout l’univers, il ne pèse que 90mg pour 1 litre de ce gaz, il est donc 11 fois plus léger que l’air que nous respirons. Cependant, pour stocker 1kg d’hydrogène, il faut un volume approximatif de 11m3(volume de chargement d’une grande camionnette), autant dire irréalisable dans un véhicule normal comme notre Mirai. Surtout que ce kilo ne permet que de parcourir 70 – 100 kms. Diverses techniques ont donc été développées pour pallier ce problème :
- Le stockage d’hydrogène à haute pression : C’est la technologie retenue par les constructeurs automobile pour les réservoirs de leurs voitures à pile à combustible. Ainsi l’hydrogène est stocké sous une pression de 700 bars (masse volumique de l’hydrogène de 42 kg/m3 contre 0,09 kg/m3 à pression atmosphérique) de façon à diminuer la taille des réservoirs nécessaires tout en conservant une température plus ou moins ambiante. Dans un réservoir de 125 litres, il est ainsi possible de stocker 5 kg d’hydrogène, de quoi parcourir 400 – 500 kms. Bien évidement ce stockage nécessite des réservoirs spécifiquement conçus pour et placer à un endroit stratégique dans la voiture pour éviter les explosions en cas d’accidents. Ci-joint les photos des Mirai et Nexo illustrant l’architecture choisie.




- Le stockage d’hydrogène sous forme liquide : L’hydrogène devient liquide à une température de -252,87°C à pression ambiante de 1,013 bar. A cette température et pression, la masse volumique de l’hydrogène passe à 71 kg/m3, on est donc en mesure de stocker 5kg dans un volume de 75 litres. Cette technique n’est pas applicable, du moins pour l’instant, au domaine automobile étant donné les températures à atteindre mais elle est utilisée pour les applications de grandes contenances qui ont des réservoirs de plusieurs milliers de litres. Citons :
- Les fusées : fusée Ariane notamment (1kg d’hydrogène représente 3 fois plus d’énergie qu’1 kg d’essence, un critère de choix),
- L’aéronautique : projet Hycarus : Air Liquide et Dassault Aviation visent à démontrer qu’il est possible d’alimenter les éléments non vitaux (cuisine, éclairage etc) d’un avion via l’hydrogène et une pile à combustible.
- Les gros bateaux de types supertanker, bateaux de croisière. Projet encore en développement tel que le Projet « Energy Observer » permettant à un gros catamaran de faire le tour du monde en 7 années uniquement avec des énergies renouvelables tel que l’éolien et le solaire (à son bord) pour produire de l’hydrogène en cours de route depuis l’eau de mer.




- Le stockage de l’hydrogène sous forme solide : Cette technique consiste à stocker l’hydrogène par absorption ou adsorption au sein d’un autre matériau tel que les composés à base de magnésium et les alanates. A ce jour cette technologie ne permet que de stocker 2 à 3% d’hydrogène (rapport en masse) par rapport au poids total du réservoir. C’est donc le gros inconvénient, voilà pourquoi cette technique est encore en développement. De plus les températures, pression et cycles de charges décharges peuvent avoir une influence qu’il est bon de maitriser correctement.
Fonctionnement des deux principaux types de piles à combustible
Pile à membrane échangeuse de protons (électrolyte acide)

Au niveau de l’anode : la molécule d’hydrogène H2 se décompose au contact du catalyseur et sépare ainsi les électrons e– de la molécule d’hydrogène H+. L’électrolyte étant perméable aux molécules H+, ceux-ci vont donc passer vers la cathode tandis que cet électrolyte est imperméable aux électrons. Ils sont donc obligés de suivre un chemin extérieur pour relier la cathode, d’où la création d’un courant électrique. Réaction chimique anodique :
2H2 -> 4H+ + 4e–
Au niveau de la cathode, l’oxygène O2 admit réagit avec les électrons e–. Ainsi la réaction cathodique suivante à lieu :
O2 + 4e– -> 2O-2
Ensuite, toujours à la cathode, les protons d’hydrogène H+ se recombinent avec les ions d’oxygène pour former de l’eau (qui sera ensuite évacuer sous forme de vapeur du véhicule) :
4H+ + 2O-2 -> 2H2O

Dans l’automobile, ce sont en général ce type de pile à combustible qui sont utilisées étant donné leur développement aisé et surtout leur température de fonctionnement maintenue (moins de 100°C), cela évite de devoir isoler de façon considérable la pile dans une voiture où l’espace est déjà restreint.
Pile à oxyde solide (électrolyte basique)
Le principe de cette pile à combustion repose sur les mêmes bases que le cas précédent sauf que les protons H+ ne traversent pas la membrane électrolytique mais restent à l’anode. Les électrons quant à eux continuent de suivre le chemin extérieur de l’anode vers la cathode.
Au niveau de la cathode, l’oxygène admit réagit comme auparavant avec les électrons selon : O2 + 4e– -> 2O-2
Seulement, après cela, ce sont les ions O2- qui traversent la membrane pour se recombiner avec les protons H+ restés à l’anode. La réaction est donc : 4 H+ + 2 O2− = 2 H2 + O2 = 2 H2O.
Ce type de pile à combustible n’est pas (encore) utilisé dans l’automobile étant donné que pour un fonctionnement optimal il est nécessaire d’atteindre une température de 600 à 800°C et il est donc nécessaire d’apporter une excellente isolation de celle – ci. De plus, sa conception coute plus cher, ce qui la destine à des applications spécifiques nécessitant de plus fortes puissances.

Les différents modèles de piles à combustible :
Les piles à combustible à électrolyte basique :
- Les piles alcalines (AFC) : leur rendement atteint 50% pour une température de fonctionnement variant de 65 à 90°C avec des pics pouvant aller jusque 250°C. Son utilisation est principalement spatiale avec les missions Apollo.
- Les piles à carbonates fondus (MCFC) : elles possèdent le meilleur rendement allant de 60 à 80% mais ont une température de fonctionnement de l’ordre de 600 – 700°C. Elles sont donc réservées aux applications stationnaires de grandes puissances (plusieurs dizaines de MW).
- Les piles à oxydes solides (SQFC) : Elles sont les seules à pouvoir se passer de catalyseur et donc de métaux rares mais fonctionnent à très hautes températures, de l’ordre de 800 – 1000°C. Elles ont une certaine inertie au démarrage dû au temps nécessaire à atteindre la température de fonctionnement adéquate mais une fois atteinte les réactions chimiques se font très rapidement « naturellement ». Ces piles sont donc réservées à des applications stationnaires de grandes envergures comme les centrales de production d’électricité.
Les piles à combustible à électrolyte acide :
- Les piles à membranes échangeuses de protons (PEMFC) : Ce sont ces modèles – ci qui sont utilisés pour les véhicules à pile à combustible. Elles ont un rendement qui peut atteindre 50%, ne nécessitent pas une température trop élevée pour fonctionner (- de 100°C), ce qui permet une montée en température rapide et une puissance totale vite atteinte dans les véhicules.
- Les piles au méthanol : Direct méthanol fuel cell (DMFC) : A la place de l’hydrogène nous utilisons du méthanol pour la réaction d’oxydoréduction. Celui – ci est injecté à l’anode, son oxydation catalytique produit de ions H+ et du gaz carbonique (CO2). La membrane permet ensuite la migration des ions H+ et les électrons permettent la création d’un courant électrique externe. Vu leur impact sur l’environnement, elles ne sont pas beaucoup utilisées (rejets de CO2 + H2O et toxicité). Malgré tout, le méthanol à le gros avantage d’être plus facile à stocker que l’hydrogène car il ne nécessite ni haute pression, ni températures basses étant donné qu’il est sous forme liquide à température ambiante. De plus, sa densité énergétique est plus importante que celle de l’hydrogène.
- Les piles à acide phosphorique (PAFC) : Elles fonctionnent entre 180 et 210°C et permet la création de plusieurs mégawatts de puissance pour des applications stationnaires. De plus, elle est également utilisée pour la cogénération en industrie.

Bibliographie
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Air Liquide Energies. (2017a, octobre 6). Comment produire l’hydrogène? https://energies.airliquide.com/fr/mediatheque-planete-hydrogene/comment-produire-lhydrogene
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Air Liquide Energies. (2020, 3 mars). Applications de l’hydrogène. https://energies.airliquide.com/fr/mediatheque-planete-hydrogene/applications-lhydrogene
H2SYS. (2016a, septembre 23). Qu’est-ce que l’hydrogène – H2Sys. https://www.h2sys.fr/fr/technologies/hydrogene/
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Pile à combustible. (2020, 29 janvier). Energie Plus Le Site. https://energieplus-lesite.be/techniques/cogeneration9/pile-a-combustible/
Planète Energies. (s. d.). Comment fabriquer l’hydrogène ? Consulté le 4 février 2021, à l’adresse https://www.planete-energies.com/fr/medias/decryptages/comment-fabriquer-l-hydrogene
Wikipedia contributors. (2020a, mars 25). Pile à combustible à méthanol direct. Wikipédia. https://fr.wikipedia.org/wiki/Pile_%C3%A0_combustible_%C3%A0_m%C3%A9thanol_direct
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Wikipedia contributors. (2021, 22 janvier). Pile à combustible. Wikipédia. https://fr.wikipedia.org/wiki/Pile_%C3%A0_combustible
Nicolas Vandersleyen
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