Nicolas Vandersleyen
Follow me
image_pdfTélécharger en PDFimage_printImprimer cet article

Certains aspects de l’automobile sont également très technologiques comme par exemple ce moteur un peu particulier sorti en 2015 avec le SQ7, la version sportive du gros SUV Audi. Depuis peu, on entend de nouveau beaucoup parlé de ce dernier étant donné qu’il vient d’être placé dans le SQ8, le SUV très haut de gamme et coupé signé Audi. De plus le SQ7 reçoit un facelift mais aucune modification n’est réalisée au niveau de son moteur V8. On voit du coup,  souvent dans les journaux qu’il s’agit d’un moteur avec deux turbocompresseurs et une micro-hybridation 48V permettant d’ajouter un compresseur électrique au moteur. Mais en réalité comment tout cela fonctionne et permet d’arriver à de telles performances ? Nous avons décidé de creuser le sujet pour vous !

Un moteur V8 tel que celui-ci part bien sûr d’une base classique avec un V à 90° et une gestion moteur électronique. A cela, on ajoute quelques modifications de pointe pour arriver à en tirer 435 chevaux (de 3750 à 5000 tr/min) et 900 Nm (de 1000 à 3250 tr/min). Tout d’abord, Audi a pensé « conception » et a mis le « côté chaud » à l’intérieur du V, ce qui était rarement le cas auparavant étant donné l’espace réduit. On y retrouve donc les deux turbocompresseurs, les collecteurs d’échappement, les vannes EGR et le système de dépollution avec catalyseur d’oxydation, filtre à particules et SCR (selective catalytic reduction) juste derrière. Les collecteurs d’admission sont donc ici placés à l’extérieur du V. De cette façon, le maximum de chaleur est conservée pour la dépollution.

A cela, s’ajoute l’Audi Valvelift System (AVS), un système électromécanique permettant de faire coulisser les arbres à cames d’admission pour utiliser une came de « démarrage » et une came de « puissance ».  En effet, pour le démarrage on favorise une longueur d’ouverture de soupape courte permettant un apport plus faible en air mais avec un meilleur brassage et donc un bon mélange du carburant (grâce en plus à un volet de turbulence électrique placé dans la tubulure d’admission principale). Pour la puissance on favorise par contre un volume de remplissage maximal avec l’ouverture totale de la soupape. Du côté échappement, le système fonctionne de la même manière sauf qu’on ouvre soit une soit deux soupapes pour évacuer les gaz. On ne joue donc pas sur une ouverture plus ou moins longue. Bien sûr, ce système est géré automatiquement par un boitier de gestion pour optimiser tous les points de fonctionnement.

Audi a aussi développé un système de micro hybridation de bord 48V permettant d’optimiser les performances du moteur grâce à un compresseur électrique mais également celle du véhicule avec un contrôle actif des barres anti roulis. La partie qui nous intéresse ici concerne le compresseur électrique 48V. Ce système 48 V comprend un alternateur haute performance (pouvant débiter jusqu’à 250A), un transformateur 12V/48V avec le contrôle de gestion de charge, les différents protocoles de communication entre chaque élément (bus CAN et LIN) et une batterie lithium – ion 13 éléments 10Ah (cette batterie possède aussi une petite gestion pour vérifier sa température de fonctionnement, activer les ventilateurs si nécessaire et mettre la batterie hors tension une fois le véhicule en veille ou en cas d’accident). A côté de cela, il y a un système normal 12V avec la batterie, ses accessoires et le démarreur. L’alternateur est commun aux deux circuits. 

Passons maintenant, à la partie croustillante de cet article : le fonctionnement de la suralimentation du V8 !

Audi a développé une admission dite en « X » avec deux intercoolers, deux turbocompresseurs, 2 collecteurs d’admission avec commande tourbillonnaire (de turbulence) pour chaque cylindre et bien sûr le compresseur électrique logé derrière l’intercooler avant gauche. 

La commande du compresseur électrique fonctionne grâce à la différence de pression entre la pression de suralimentation réelle dans les collecteurs d’admission et la pression théorique qu’il devrait y avoir pour répondre à la demande d’accélération du conducteur. En fonction de cette valeur, le module de commande décide d’activer ou non le compresseur électrique en fonction du régime, de la charge, des débits d’air, de la température d’air d’admission etc pour pallier aux temps de latence des deux turbocompresseurs. Nous pouvons distinguer 4 modes de fonctionnement distincts :

Démarrage :

Dans ce cas-ci, une seule soupape d’échappement est ouverte, un seul intercooler est utilisé (grâce au papillon électrique dans la tubulure d’admission permettant de choisir 1 ou 2 intercoolers) et le compresseur est activé électriquement. De plus, le turbocompresseur N°1, appelé « actif » est également alimenté.  Ce mode est utilisé de 800 tr/min à 1500 tr/min avec un couple de 900 Nm dès 1000 tours et une pression maximale dans le collecteur d’admission à 1500 tr/min de 3,4bars. Ici le compresseur permet de « gaver » le turbocompresseur actif d’air et d’ainsi pallier son temps de latence dû aux faible flux de gaz d’échappement à bas régime. 

  • Bas régime et basse charge

Ce mode fonctionne de 1500 tr/min à 2200 tr/min environ. Nous avons ici, une seule soupape d’échappement ouverte, les deux intercoolers en fonctionnement, le compresseur électrique désactivé (grâce au volet by-pass électrique) et le turbocompresseur actif fonctionnant à plein régime.

  • Mode monoturbo, préparation biturbo

Nous avons ici un mode fonctionnant de 2200 à 2700 tr/min un peu particulier en ce sens qu’il va permettre de démarrer le 2e turbocompresseur, appelé « passif » et d’ainsi, dans la phase suivante, avoir la pleine puissance sans temps de latence. Dans ce cas-ci, les deux intercoolers sont utilisés et le compresseur électrique n’est pas alimenté. Nous avons tout d’abord les soupapes d’échappement qui s’ouvrent grâce à l’AVS les unes après les autres en fonction de l’élévation du régime et selon l’ordre d’injection pour tout doucement amener à une transition des gaz d’échappement vers le 2e turbo. Bien sûr pour garder un couple élevé le turbo actif doit rester à son plein régime, et donc alimenté de la même façon. C’est pourquoi Audi, a pensé à mettre une vanne de recirculation d’air commandée électriquement entre les deux parties « compresseurs » des deux turbos. Ainsi, la mise en route progressive du turbo passif entraine une légère compression de l’air d’admission de celui-ci. Cet air est renvoyé à l’amont du turbo actif (grâce à un blocage pneumatique de la tubulure d’admission passive) pour compenser la perte d’énergie due aux moindres gaz d’échappement entrainant ce – dernier. De cette manière, le turbo actif est toujours très bien alimenté et le turbo passif tourne petit à petit de plus en plus vite.

  • Mode Biturbo

Ce mode est le dernier de la série et correspond bien sûr à la plage restante, c’est-à-dire 2700 tr/min – 5000 tr/min, autrement dit, pleine puissance charge élevée. Dans ce cas-ci, nous avons les deux intercoolers actifs et l’ensemble des soupapes d’échappement ouvertes ce qui permet d’alimenter de façon optimale les deux turbines des deux turbocompresseurs. La vanne de recirculation d’air entre les deux turbos est bien sûr fermée, et l’ensemble de l’air comprimé par ces derniers va ensuite dans les deux intercoolers (le blocage pneumatique de la tubulure passive est surmonté dû à la pression fournie par le turbo passif). Grâce à ce système ingénieux, nous obtenons une pression de suralimentation élevée de 3,4 bars et une forte puissance.

Nota Bene : Lorsque le compresseur électrique est désactivé, en réalité, il n’est pas totalement à l’arrêt. Il est toujours alimenté en électricité et tourne à un régime constant de 5000 tr/min. Seulement il n’y a plus d’air qui passe dedans dû à la vanne by – pass. Ceci est réalisé dans le but d’avoir une remise en route la plus rapide et la plus franche possible lorsque le régime retombe bas et que le conducteur demande une forte accélération. Ce serait par exemple typiquement le cas sur les routes de montagnes. Grâce à cette gestion, nous évitons son temps de latence de mise en route et gagnons en performance.

Pour terminer, nous pouvons donc voir que le système de suralimentation du V8 Audi est très complexe et a dû demandé une longue recherche pour que tous cela fonctionne de façon optimale et donne un couple et une puissance linéaire. Peut-être aurons-nous un jour l’occasion de tester les performances de ce moteur hors norme ?

Il faut d’ailleurs reconnaître que ce système est assez ingénieux pour arriver à optimiser encore plus les moteurs diesel en les gavant d’air et ceci de façon plus contrôlée qu’avec des turbos classiques. Malheureusement, c’est la consommation électrique qui en pâti vu qu’il est nécessaire d’avoir une architecture 48V à bord. Ce système est actuellement présent uniquement sur ce moteur V8 et permet d’avoir une consommation raisonnable et de respecter les normes de pollution tout en sortant 435 chevaux. Cela pourrait donc peut – être s’étendre à d’autres moteurs diesel pour avoir une puissance plus élevée avec une consommation et une cylindrée réduite, néanmoins, il faut voir si sur une plus petite voiture cela peut devenir rentable.

Nicolas Vandersleyen

image_pdfTélécharger en PDFimage_printImprimer cet article
Envoi
User Review
0 (0 votes)

3 Comments

  • brigittedewitskynetbe dit :

    article intéressant (je travaillerais un peu la syntaxe)

  • Michel dAwans dit :

    Hello Luc et Nicolas,

    C’est une excellente idée de lancer vos articles « How does it work ».

    Mais les légendes des schémas inclus (c’est-à-dire les noms des pièces telle Pompe de suralimentation, etc) sont illisibles… Il faut absolument que vous joigniez des schémas de qualité, càd des schémas “lourds” (en poids informatique…) ! Pour un article qui se veut être une explication technique, cela me paraît vraiment indispensable…

    A bientôt ! Bises,

    Michel. 0473-23.69.47

    >

Laisser un commentaire

En savoir plus sur Auto4X4 en roues libres

Abonnez-vous pour poursuivre la lecture et avoir accès à l’ensemble des archives.

Continue reading